En raison de la spécificité de son objet et de son adaptation à une dynamique en constante évolution, le droit de l'environnement regorge de normes au contenu forcément tributaires de données économiques, politiques et éthiques, parmi lesquelles figurent notamment les principes du pollueur-payeur, de prévention et de précaution. En raison de l'affirmation continue de ces trois principes dans des conventions internationales et des législations de droit interne, l'auteur s'interroge sur leur portée normative. Ces principes directeurs de l'action des pouvoirs publics tentent notamment de conjurer le risque d'une trop grande technicité en inspirant une cascade de règles plus précises et plus contraignantes. Rappelant leur genèse et systématisant leur application potentielle tant en droit international et en droit communautaire que dans différents ordres juridiques nationaux, l'ouvrage tente de mettre en évidence, dans une perspective critique, leurs virtualités et leurs limites pour le droit positif.
C'est un honneur de recenser ce qui restera sans doute l'un des ouvrages les plus importants du droit de l'environnement et dont la résistance aux ans nous autorise à en parler avec quelque retard. Empruntant souvent à la matière des déchets qui vit naître ses premières œuvres, l'auteur se sera justement efforcé de nous procurer un livre à l'utilisation durable. Dans une langue agréable, ce qui mérite aussi d'être souligné, Nicolas de Sadeleer nous promène dans les méandres d'une discipline «pique-assiette », sachant que « les règles applicables à la protection de l'environnement ressortent à la fois du droit civil, droit public et du droit pénal sans que l'on puisse toujours apercevoir ce qu'ils en distinguent. Se recoupant en mains en droit et s'enchevêtrant à l'envi, les branches du droit sont donc tout sauf étanches et les guerres de frontière qu'elle se livrent sont récurrentes », l'auteur résumant d'ailleurs la difficulté par un très belle oxymoron lorsqu'il parle de socle empirique.
Aussi, c’est sans fausse modestie que l' « environnementaliste» vole avec la même aisance du droit international au droit interne en passant par le droit européen et le droit comparé, et du droit constitutionnel au droit administratif et à la responsabilité civile, sans oublier de solides emprunts à la théorie générale du droit. …. Si je suis souvent avare de compliments, nous connaissons la belle phrase de Beaumarchais qui figure en tête du Figaro. Bref : plus qu'un bel essai, une belle thèse !
